Dans Ainsi nous leur faisons la guerre, l'écrivain Joseph Andras relate la controverse politique ayant opposé des activistes féministes, des étudiants en médecine et des forces de police, autour d'une statue érigée en Angleterre pour rendre hommage au « Brown dog », un chien terrier disséqué sans anesthésie au nom de la Science. Soudain, l'érection d'un monument hommage rend visible le rapport au vivant non-humain, et en le matérialisant elle l'interroge, elle le politise.

Baptiste Morizot souligne la nécessité de penser ces rapports avec d'autres animalités que la nôtre, trop souvent éludées, minimisées ou ignorées. Institutionnaliser la présence animale en lui érigeant des monuments de pierre, est-ce renouer avec des sociabilités qui relèvent d'une « diplomatie interespèces » (Morizot, 2016) ? Ou est-ce une forme d'anthropisation qui minéralise le vivant, en le coulant dans un symbolisme patrimonial ?

Il s'agira d'interroger ce qui semble relever d'un double fonctionnement : d'un côté les statues individualisées, rendant hommage à un animal en particulier (un chien sauveteur d'enfant, les moutons de Pasteur). De l'autre, des animaux de pierre sans nom ni identité, aux fonctions ornementales ou totémisantes (des oiseaux de bronze pour esthétiser des ronds-points). Quel mode de coexistence se dessine à travers ces différentes figurations ?

Nous proposons une exploration sémiotique des statues d'animaux présentes dans les parcs, les squares et les places parisiennes. Nous revendiquons une méthodologie exploratoire qui relève plus de la « chasse au trésor » que de la collecte systématisée. À partir de ces trouvailles sémiologiques, photographiées au fil de nos déambulations parisiennes, nous souhaiterions élaborer une réflexion sur cette forme de vivre-ensemble qui consister à représenter matériellement et publiquement l'altérité.